
Le trafic internet continue d’exploser avec le boom de la vidéo. Même si le consommateur paie déjà son abonnement à internet, les opérateurs font payer dans certaines circonstances des accords d’interconnexions à d’autres sociétés lorsqu’ils estiment être désavantagés par la quantité de données traversant leur réseau. Dans ce contexte, le petit Init7 a remporté une nouvelle bataille face au géant Swisscom!
Le peering est un accord d’interconnexion permettant à deux réseaux d’échanger directement leur trafic de données, évitant ainsi des détours coûteux et inefficaces. La Commission de la communication ComCom vient de rendre une décision qui pourrait faire date en contraignant Swisscom à établir un accord de peering gratuit avec Init7, mettant fin à une bataille juridique qui durait depuis 2013, selon le communiqué d’Init7.
Rendue peu avant Noël, cette décision marque un tournant dans le monde des télécoms, car ce serait la première fois qu’un régulateur européen aurait statué sur le cette forme d’interconnexion. Particulièrement complexe, ce dossier a nécessité deux études de marché de l’Office fédéral de la communication (OFCOM) et plusieurs expertises de la Commission de la concurrence (COMCO) et une analyse du Surveillant des prix.
Le contexte technique et économique
Jusqu’à présent, Swisscom utilisait le ratio entre le trafic entrant et sortant comme justification pour facturer des frais supplémentaires aux fournisseurs de contenu. La ComCom a jugé cette pratique non pertinente, car le sens de circulation des données n’influence pas sur les coûts d’infrastructure.
L’interconnexion entre réseaux est comparable à un système routier où chaque opérateur gère ses propres routes et participe équitablement aux points de jonction. Dans ce nouveau cadre, chaque partenaire prend en charge ses propres frais d’infrastructure, se limitant aux ports des routeurs et aux câbles, selon le même texte.
Les pratiques anticoncurrentielles révélées
La même source précise que l’enquête a mis en lumière une entente entre Swisscom et Deutsche Telekom, s’apparentant à un cartel, pour imposer des paiements aux fournisseurs de contenu. Cette pratique permettait à Swisscom d’agir comme un gardien, contrôlant l’accès à ses clients finaux et exigeant des paiements pour la diffusion de contenus comme le streaming vidéo.
La décision s’appuie sur le «principe du pollueur-payeur», établissant que les coûts sont déjà couverts par les abonnements haut débit des clients finaux, comme indiqué en introduction. Cette approche met fin à une double facturation injustifiée, toujours selon le même texte, qui pourrait faire couler beaucoup d’encre!
Par ailleurs, la ComCom impose désormais à Swisscom de procéder à des mises à niveau coopératives dès que 50% de la capacité nominale est atteinte, est-il précisé dans le communiqué d’Init7. Cette obligation garantira une meilleure qualité de service pour tous les utilisateurs finaux.
Le petit Init7 avait encore une fois raison!
Bien que Swisscom puisse encore faire appel devant le Tribunal administratif fédéral, ses chances de succès semblent limitées, selon Init7. Le même tribunal avait en effet déjà tranché en faveur du petit poucet en avril 2020, suggérant une confirmation probable de cette nouvelle décision.
Dans tous les cas, il est réjouissant de voir que de petites sociétés font régulièrement plier des géants comme Swisscom, qui donnent parfois l’impression de pouvoir faire ce qu’ils veulent, comme dans le dossier de la fibre optique. Le combat d’Init7 est exemplaire et montre combien il est difficile (mais nécessaire) dans le commerce de faire plier des monstres.
Xavier Studer